L'austérité est-elle efficace?

par jules bergeron. COLLABORATION SPÉCIALE.

Les États sont endettés, l’économie et les finances publiques vont mal. La table est mise pour appliquer des mesures d’austérité. Elles sont principalement constituées de coupures dans les programmes sociaux et d’augmentation de tarifs. Mais ces solutions ont-elles leur raison d’être? Sont-elles efficaces?

Rien n’est moins sûr. Les politiques d’austérité imposées il y a quelques années à des pays comme l’Espagne et la Grèce se sont traduites par une flambée du taux de chômage, un accès limité aux programmes sociaux, sans oublier la privatisation à vil prix de services publics. Autrement dit, le coût social et économique de l’austérité est trop lourd.

C’est ce que reconnaissent maintenant les économistes du Fonds monétaire international (FMI). Ils affirment, dans un rapport rendu public en mars 2014, que les mesures d’austérité imposées aux pays en échange de l’aide accordée par le FMI nuisent à l’économie et à la croissance, en plus d’augmenter les inégalités socioéconomiques, étant donné que ce sont les pauvres et la classe moyenne qui sont davantage touchés que les mieux nantis.

Pour corriger le tir, ces mêmes économistes du FMI, qui avaient pourtant contribué auparavant à l’élaboration de plans d’austérité pour les pays demandeurs d’aide, suggèrent maintenant aux gouvernements nationaux d’investir davantage dans les programmes sociaux et de trouver de nouvelles sources de revenus comme l’imposition des plus riches, la levée de nouvelles taxes sur des biens de luxe, etc.

D’autres économistes, et pas les moindres, vont encore plus loin. Joseph Stiglitz et Paul Krugman, tous deux prix Nobel d’économie, affirment que les politiques d’austérité constituent un échec monumental comme moyen pour remettre les pays sur la voie de la prospérité. Pour eux, la prospérité s’acquiert par la création d’emplois et par des investissements massifs dans l’éducation, l’économie du savoir, l’innovation, les nouvelles technologies et dans les infrastructures. Il faut repenser la fiscalité pour que les très bien nantis fassent leur part, et règlementer sévèrement le secteur bancaire et financier.

Un exemple digne de mention au chapitre de la réussite est l’Islande. Bien sûr, le pays est tout petit (à peine 325000 habitants) mais le scénario retenu pour la sortie de crise constitue une référence. En 2010, après avoir rejeté le plan d’austérité imposé par le FMI, le gouvernement islandais a décidé d’investir massivement dans ses programmes sociaux, qui sont passés de 21% à 25% du produit national brut (PNB) du pays. Le filet de protection sociale s’est amélioré, protégeant mieux l’ensemble de la population. Résultat: en 2012, l’Islande avait un taux de chômage inférieur à 5%, un taux de croissance économique de 3% et avait même commencé à rembourser plus rapidement sa dette nationale. Le FMI a d’ailleurs affirmé que l’approche islandaise avait entraîné une reprise économique étonnamment forte. Bref, tout le contraire de ce qui s’est passé en Espagne, en Grèce, au Portugal, etc.

Pour en savoir plus

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