Yémen, la guerre silencieuse

Un nouveau cauchemar syrien?

Guerre civile sur fond de conflit de pouvoir religieux entre les deux principaux courants de l’Islam: la situation du Yémen a tout pour rappeler le cauchemar syrien.

Au premier plan, cette guerre oppose le mouvement houthiste, soutenu par des groupes militaires fidèles à l’ancien président Ali Abdallah Saleh, déchu lors de la vague du printemps arabe qui atteignit le Yémen en 2011, et le gouvernement officiel. Parallèlement, les groupes islamistes radicaux, Al Qaeda dans la Péninsule Arabique et l’État islamiste en tête, profitent également du chaos pour gangréner le pays.

Le conflit touche l’ensemble du Yémen. Il prend néanmoins ses racines dans le nord du pays, fief historique des rebelles houthistes. C’est en effet ce mouvement, de confession zaïdiste, un courant du chiisme partagé par plus de 40 % de la population yéménite, qui est l’élément déclencheur du conflit.

Les rebelles houthistes sont parvenus à s’emparer, dans un premier temps de Sanaa, la capitale, en septembre 2014, pour atteindre le sud du pays en mars 2015, ce qui provoquera la fuite du président officiel, Abd Rabbo Mansour Hadi, vers l’Arabie saoudite.

DES RÉSONANCES RÉGIONALES

La réaction de cette dernière ne se fera pas attendre, alors que les rebelles contrôlent désormais tout l’ouest du pays, elle décide de mobiliser une coalition de pays arabes, majoritairement sunnites, afin de répondre militairement. L’objectif de la monarchie est de protéger la frontière qu’elle partage avec l’État yéménite, mais également d’amoindrir l’influence présumée de l’Iran, accusé de soutenir le mouvement houthiste.

Car la guerre semble autant civile que régionale, soumise à l’affrontement géopolitique des deux puissances de la région: d’un côté l’Arabie saoudite et sa coalition représentant l’islam sunnite, soutenue également par certaines puissances occidentales, et de l’autre, l’Iran, chef de file de l’islam chiite.

Cet été, la coalition saoudienne est parvenue à reconquérir Aden, principal port du pays. Le 22 septembre, le président alors en exil a pu retourner dans cette ville, déclarée capitale provisoire. Afin de reprendre le contrôle de Sanaa, toujours aux mains des rebelles houthistes, Le royaume saoudien et ses alliés ont lancé une offensive terrestre le 13 septembre dernier.

LE PEUPLE YÉMÉNITE, «DOMMAGE COLLATÉRAL»

Comme le témoigne l’exemple syrien, les seules vraies victimes restent les populations civiles. Le Yémen, qui a peu de ressources sur son territoire, importe 90 % de ses besoins alimentaires. L’Arabie saoudite impose actuellement un blocus naval pour limiter le nombre d’armes qui accèdent au pays. Les conséquences en sont peut-être encore plus dramatiques que le conflit lui-même: alors que 80 % de la population nécessite une assistance humanitaire, entravée par ce blocus, la moitié de la population est privée d’accès à l’eau potable, 60 % de la population est menacée d’insécurité alimentaire et plus d’un million d’enfants souffrent de malnutrition.

D’après l’ONU, le conflit a causé, depuis mars dernier, presque 5000 morts et plus de 25 000 blessés. Des milliers de personnes quittent le pays chaque semaine. Car en effet, quelle solution reste-t-il aux Yéménites pour survivre, alors que le pays est mis à feu et à sang dans l’indifférence la plus totale?