Les inégalités des changements climatiques

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par Xavier St-Pierre


Comment définir succinctement les changements climatiques ?

Il s’agit d’une augmentation de l’intensité du climat : les températures chaudes le seront de plus en plus, comme les températures froides seront de plus en plus froides. Puis, la fréquence des évènements climatiques intenses augmentera. Les changements du climat s’observent sur une base d’environ 30 ans. Ce faisant, il ne faut pas confondre le climat et la météo : cette dernière ne concerne que le court terme : pleuvra-t-il demain, par exemple. Ce n’est donc parce qu’il fait froid cet hiver qu’il n’y a pas un réchauffement global du climat. Nous ne le répéterons jamais assez, mais un consensus scientifique, qui établit le lien entre changements climatiques et activités humaines, existe. Il ne s’agit donc pas d’un complot, comme semble vouloir l’insinuer le président de nos voisins et certaines personnes présentes dans les médias propageant cette dangereuse aberration. Les changements climatiques sont réels et c’est à nous de corriger la situation.

Concrètement, comment se présentent les inégalités des changements climatiques à l’échelle planétaire ?

Les conséquences des changements climatiques ne sont pas uniformément réparties dans le monde. Ainsi, les pays sont différemment touchés, par exemple : un pays peut être plus ou moins élevé par rapport au niveau de la mer, ce qui influera sur son exposition aux inondations suite à la hausse anticipée du niveau moyen mondial des mers. Alors qu’un autre pays peut être dans une région plus ou moins à risque de sécheresse, subissant des impacts différents des changements du climat.

Inégalités et injustice climatiques se côtoient également de manière historique, puisque ce ne sont pas les pays qui ont contribués le plus à l’augmentation de la quantité de gaz à effet de serre qui paieront les changements climatiques au prix fort, alors que les grands pollueurs occidentaux en subiront moins les conséquences tout en ayant de plus grands moyens d’adaptation. Par exemple, le Vietnam, où plus de 15 millions de personnes vivent avec moins de 1,25$ par jour, se trouve dans les 10 pays avec le plus de personnes situées dans des zones à risque comprenant, notamment, un nombre important de personnes vivant près du littoral, vulnérables à la montée du niveau de la mer.

Sur une échelle nationale, existent-ils des inégalités climatiques au Canada et au Québec ?

Dans les villes

Les inégalités climatiques sont aussi bien réelles à une échelle plus réduite, comme au Québec et au Canada. Ainsi, les îlots de chaleur, qui sont des lieux où la température est plus élevée d’environ 5 à 10 degrés par rapport aux lieux environnants, sont une problématique qui affecte davantage les quartiers défavorisés que les quartiers où vivent les plus nantis. En effet, les zone urbaines défavorisées sont moins végétalisées, la population y est plus dense, l’accès à la climatisation est moindre. Ces facteurs, et d’autres relatifs aux types de bâtiments notamment, contribuent à l’augmentation de la chaleur dans ces environnements. Cette situation n’est pas propre à la métropole, mais se constate entre toutes les zones urbaines et rurales, de sorte que « le risque de mourir durant les vagues de chaleur est un problème davantage social que biologique »[1].

Entre les villes

De plus, les régions éloignées des grands centres, dans le Nord du Canada ou à l’Est du Québec, rencontrent des problématiques loin des préoccupations que nous connaissons dans nos centres urbains. En Gaspésie, alors que des enjeux économiques précarisent la région, l’érosion des côtes rend de plus en plus vulnérables les secteurs riverains aux inondations et autres aléas climatiques. Dans le Grand Nord du Canada, la fonte du pergélisol, met en danger les immeubles et accélère d’autant plus les changements climatiques. Le pergélisol est un sol gelé en permanence, qui, avec le réchauffement du climat, dégèle. Sa fonte provoque la libération d’une quantité importante de gaz à effet de serre qui était auparavant enfermé dans le sol. Cela affecte majoritairement les peuples autochtones du Nord canadien, qui sont déjà marginalisés culturellement et économiquement.




Légende : Les changements climatiques vont accentuer l’intensité du climat, mais aussi la violence et la fréquence des aléas climatiques extrêmes.


Une justice sociale totale contre les inégalités climatiques

Enfin, alors qu’il y a un refus que cela passe par « notre » terrain – au Québec, avec le mouvement Coule pas chez nous par exemple – le portrait des injustices climatiques brièvement dressé illustre que nos actions ici ont un impact chez les autres, là-bas. Et ces autres-là, il s’agit des populations les moins nantis qui n’ont souvent pas les ressources nécessaires pour s’adapter et répondre aux conséquences climatiques. Ainsi, la possibilité même de réclamer une justice environnementale et de dire «passe pas chez nous» est un privilège dont il faut avoir conscience.

De plus, il ne faut pas oublier qu’un néocolonialisme dévore les terres des pays du Sud pour alimenter les désirs sans limite des populations occidentales. Ainsi, l’action des multinationales occidentales, qui pillent les ressources naturelles au nom du développement économique, empêche toute adaptation de l’agriculture aux enjeux climatiques. Injustice sociale et climatique sont bel et bien liés !

Il faudrait en outre que nos gouvernements prennent davantage en compte notre responsabilité collective, en tant que société occidentale industrialisée, dont les pays sont parmi les principaux émetteurs des gaz à effet de serre.

Bref, la justice sociale, prise dans son ensemble, c’est considérer tout à la fois les inégalités environnementales, économiques et de genre, afin de lutter contre les changements climatiques, en incluant l’ensemble de la planète dans les luttes locales de défense de l’environnement. Puisque, en dépit du caractère planétaire des changements climatiques, il ne faut pas perdre de vue les différences locales, issues des inégalités sociales ou relatives à l’environnement, de l’expérience des bouleversements. La lutte aux changements climatiques comporte ainsi son lot de solutions locales qui se doivent d’être adaptées aux spécificités des populations.