CARNETS DE VOYAGE À CUBA (1)

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Cet été, dans le cadre d’un stage Québec Sans Frontières, huit stagiaires se sont envolé.e.s à Cuba afin d’ouvrir le dialogue avec la population sur les droits des minorités sexuelles, d’aider dans les campagnes de prévention du VIH et de travailler avec les groupes LGBTQ dans la province de Granma. Deux stagiaires nous livrent leurs réfléxions.

femmes trans et sexe transactionnel à bayamo


par alejandro polanco


Bien que la prostitution soit illégale à Cuba, plusieurs personnes pratiquent le sexe transactionnel (PPST). Il s’agit d’offrir des services sexuels en échange d’argent, de cadeaux ou d’un bénéfice quelconque. Beaucoup de femmes trans y trouvent le moyen d’obtenir plus d’argent, en l’effectuant en parallèle de leur travail, pour bien s’habiller, pour quitter le pays, pour mieux vivre. Mais parfois, c’est seulement pour pouvoir se payer à manger, alors que la discrimination sur le marché du travail demeure présente malgré les campagnes annuelles de lutte contre la transphobie.

Quant à leurs conditions de travail, elles sont souvent précaires. Il est à peu près impossible d’utiliser l’internet qui est très contrôlé, les rencontres doivent donc se faire dans la rue, de façon discrète. Les lieux de rencontre nocturnes, comme les parcs, sont les plus utilisés, car il est difficile de ramener quelqu’un chez soi. Et dans les hôtels ou les casas particulares, l’identité des Cubain.e.s est strictement contrôlée et leur accès restreint.

C’est pourquoi ces femmes sont vulnérables à toutes sortes de violences et d’abus, notamment de la part des policiers qui font du profilage social quand ils les voient. « Cela arrive souvent que [les policiers] nous embarquent, nous battent et nous violent » affirme Rihanna, coordonnatrice provinciale du réseau Transcuba à Granma. Et même si le réseau Transcuba dispose de l’aide juridique spécialisée dans chaque province, la plupart de ces crimes restent impunis.

Concernant les femmes trans séropositives qui pratiquent le sexe transactionnel, une grande partie n’adhère pas au traitement antirétroviral par peur que leur apparence physique change drastiquement, étant donné qu’un des principaux effets indésirables du traitement est la lipodystrophie – accumulation et/ou perte des graisses corporelles à différents niveaux du corps. Malheureusement, cette peur de compromettre leur processus de transition cause annuellement des pertes humaines considérables dans la communauté.

Enfin, pour les femmes trans à Bayamo, se battre pour des droits inscrits dans leur constitution – comme le respect de l’intégrité physique, la non-discrimination, l’accès à l’emploi – reste un enjeu quotidien. Aujourd’hui, le CENESEX travaille pour améliorer leur condition et celle de toutes les minorités sexuelles. Projet de loi pour le mariage égalitaire, proposition de pénaliser le client qui demande des services sexuels, sont quelques-uns des débats menés, mais la transformation n’avance pas assez vite pour ces personnes dont leur vie est menacée.